lundi 22 août 2011

Semaine 2

( BIENTÔT LES PHOTOS! )

SEMAINE 2

20/07/2011

Nous partons du bureau de Caritas Dhaka à 7h30 en direction périphérie de la ville. Taposh – Gosh, responsable
d’un programme d’éducation pour les communautés ethniques (et en particulier la communauté Rishi) nous
accompagne pour notre circuit dans le Sud du pays. Ensuite, c’est en bus que nous nous rendons dans le
secteur de Satkhira, région voisine de Khulna. Apres trois heures de trajet prenons le ferry qui nous amène de
l’autre cote du Padma, une des grandes rivières du pays. Encore six heures de trajet plus tard, nous atteignons
enfin la ville de Satkhira. Nous sommes logés dans un centre médico-social soutenu par l’ONG "Rishpil". Ce
centre soigne des enfants et adultes porteurs de handicap physique, et scolarise des enfants locaux. De manière
inattendue, cela nous permet à nouveau de vivre une expérience enrichissante, en dehors du programme réalisé
par Caritas. En parlant d’expériences nouvelles, nous avons la joie d’apprendre que les serpents côtoient les
villageois le soir : nous étions habitues aux blattes, nous passons désormais a un autre niveau !

21/07/11

Pour la première fois depuis notre arrivée, nous nous réveillons les pieds dans l’eau. Nous découvrons ce qu’est
la mousson, ainsi que le transport en Rickshaw (tricycle) sur des routes inondées. Apres une heure de trajet pour
le moins agité, nous arrivons à Fingri. Nous sommes accueillis dans une communauté Rishi en musique avec
tambours, maracas, trompette et accordéon local. Les fleurs et les sourires sont toujours au rendez vous, mais
leur coutume nous étonne : les femmes et les hommes se vernissent et se décorent les mains avec une sorte de
peinture rouge. Cette communauté est dite ‘intouchable’ d’après le système de caste Hindou. De fait, ils sont
considérés comme une sous population (originaire d’Inde) et subissent beaucoup de discriminations. On ne leur
accorde que très peu d’emploi et, en dehors des aides par des associations, ils sont relayés au second plan pour
les actions sociales (accord de microcrédit, droit a l’éducation…).

L’école du village, gérée par Caritas, est ouverte à la fois aux enfants des familles Rishi, de familles
Musulmanes, et aussi d’autres religions, mais avant tout des enfants issus d’un milieu pauvre. Actuellement, elle
comporte cinq classes d’élèves, ayant entre 3 ans et 14 ans. Nous sommes heureux de constater que même dans
des conditions économiques difficiles, la majorité des enfants poursuivent leur éducation secondaire. Ceux qui
arrêtent leurs études le font soit en cours d’année scolaire, soit en fin de cycle. En effet, souvent le financement
des études secondaires leur est impossible. Mais d’autres fois, le motif est plus idéologique puisque leurs parents
n’estiment pas que l’éducation soit essentielle et préfèrent les faire travailler pour contribuer au maintien de la
famille.

Outre l’école, nous avons un temps d’échange avec les personnes du village. Comme dans les autres
communautés du Nord du pays, ils sont intéressés par notre manière de vivre … et nous par la leur qui n’est pas
tout à fait la même que dans la région de Dinajpur. En particulier, Caritas insiste les adultes Rishi à travailler.
En quelques années, ce changement a permis une évolution. Par exemple, certains Rishi travaillent dans des
ONG et font la promotion de l’éducation, de la santé, des aides sociales, etc. , ce qui est encourageant. Ainsi,
le programme Caritas permet une meilleure intégration des plus défavorisés. Il tente aussi de transmettre des
méthodes pédagogiques centrées sur les enfants, en formant les professeurs chaque année. Sans ce programme,
la communauté n’aurait eu aucun droit a l’éducation. Pour l’instant, malgré tout, l’illettrisme perdure.

L’après midi, nous sommes invités dans une communauté mixte, composée de personnes rishi, musulmanes et
hindous. Des membres du comité de gestion de l’école sont présents, leur rôle est de procéder à un suivi des
professeurs et d’améliorer le programme d’éducation. Ils organisent des journées d’activités éducatives et de
loisirs car ils considèrent que les activités culturelles sont aussi importantes que l’éducation scolaire classique.
Tous les six mois, le comité et les parents se retrouvent pour discuter et résoudre des problèmes s’il en existe.
Les parents sont heureux d’avoir une école à proximité car ils ne peuvent pas aller plus loin en raison des
difficultés d’accès. En effet dans cette école aussi, une partie des élèves arrêtent en 3ème classe (vers l’âge de 9
ans) mais d’autres parviennent à atteindre les grandes études.

22/07/11

Ce matin, le soleil est présent, et nous partons découvrir un village de pêcheurs appelé Shalley. L’accès n’y
est possible que par un étroit chemin de terre à moitie recouvert par des briques, et bordé de part et d’autre par
des bassins d’élevage de crevettes. L’accueil est modeste mais chaleureux. Une partie du village est absente et
pour cause : le pont reliant les deux ilots est détruit par la crue de la rivière. Cependant, le comite de gestion

a fait en sorte d’être présent, ainsi qu’une partie des élèves et parents. Nous sommes accompagnes de deux
responsables de programme de Caritas, et avons l’honneur de la présence du chef de communauté. Apres une
brève introduction sur les actions de Caritas par les salariés locaux, un dialogue ouvert s’en suit. La communauté
nous montre son intérêt en prenant l’initiative de nous poser des questions sur la raison de notre visite et le
mode de vie français, en particulier la vie familiale et le système scolaire. Dans ce village de pêcheurs, des
communautés musulmanes, catholiques et hindous cohabitent en harmonie et fraternisent au quotidien.

Du fait que l’école locale ne soir pas autonome, Caritas prend en charge la totalité des frais de fonctionnement.
L’intégralité des enfants, soit 74, est scolarisée. Cinq classes sont assurées par l’école, deux de niveau maternelle
et trois de primaire, le tout animé par deux enseignants. La motivation des parents est visible : ils mettent tout
en œuvre pour que leurs enfants progressent. Ils n’hésitent pas à faire appel aux professeurs pour les épauler à
domicile. D’ailleurs, les professeurs jouent un rôle bien plus large que l’enseignement scolaire. Ils écoutent et
conseillent les familles sur des problèmes d’éducation ou encore sur des questions économiques. Les familles
ont les moyens de fournir le matériel scolaire, mais le financement d’études secondaires reste la plupart du temps
trop onéreux. Rappelons que leur seul revenu provient de la pèche, et cette activité est très aléatoire.

Caritas mettant en œuvre des programmes pour promouvoir la place des femmes, nous posons la question du
statut des femmes dans leur communauté. Elles s’émancipent progressivement grâce à la vente d’animaux.
Au sein du ménage, l’homme et la femme ont bien souvent chacun leur revenu, mais il reste leur propriété
individuelle. Evidemment, les dépenses plus conséquentes se font avec l’engagement de l’épargne du couple.

L’après midi, nous nous rendons dans un foyer pour garçons, géré par le Père Carlos d’origine mexicaine. Nous
échangeons nos manières de procéder sur le système scolaire. Nous rencontrons plusieurs de ces enfants, parmi
lesquels certains se détachent par leur motivation et curiosité. Le Père Carlos nous conduit ensuite au couvent
avec lequel son foyer s’associe pour permettre d’offrir une scolarité aux enfants. Nous partageons danses et
chants locaux avec les filles scolarisées.

23/07/11

C’est la première fois que nous assistons réellement à un cours : nous sommes assis au fond de la classe
pendant que la maîtresse déroule son programme. Il débute par l’appel des enfants, puis quatre ateliers leur
sont proposés : mathématiques, bengali, dessin (loisirs créatifs) et jeux. En fonction de leur motivation, ils
peuvent changer d’activité. Le professeur nous explique que, lorsqu’un enfant est en avance sur le programme,
il lui propose d’autres manuels adaptés à son niveau afin de ne pas le freiner dans son apprentissage. Le travail
par pôle d’activité est une préconisation du programme UCPEP de Caritas. La maitresse nous propose de leur
apprendre une chanson apprise dans nos classes maternelles. C’est ainsi que nous entonnons « une souris verte »
puis « savez-vous planter des choux ? » ce qui amuse beaucoup les élèves … et les adultes !

Après ce moment ludique, nous nous entretenons plus sérieusement avec des parents, des membres du comité de
gestion et une conseillère gouvernementale présente pour appuyer le programme. Leurs principaux problèmes
sont d’ordres financier et matériel (et en particulier l’agrandissement de l’école). Ils ne peuvent réaliser les
travaux eux-mêmes car ils ont déjà des difficultés à se procurer de la nourriture et des vêtements. Les parents
nous demandent de donner notre avis sur l’école du village, ils sont sensibles à nos remarques et à nos pistes
d’amélioration. D’ailleurs les professeurs vont bientôt se former à la mise en place d’un nouveau programme
élaboré par Caritas, car le niveau des enfants progresse constamment et l’association s’adapte en permanence à la
réalité de terrain.

Avant de quitter le village, nous avons aussi l’occasion de découvrir la façon dont travaillent les artisans de
céramique. En effet, la fabrication de poterie traditionnelle est la principale source de revenu de la communauté.

En fin de matinée, le directeur du centre de rééducation où nous sommes hébergés nous fait l’honneur de nous
faire visiter les lieux et de nous expliquer son fonctionnement. Nous sommes étonnés de constater que les
méthodes de soins sont identiques qu’en France. Grâce à des fonds hollandais et italiens, les enfants porteurs de
handicap bénéficient d’ateliers d’ergothérapie et de psychomotricité. De plus, les enfants développent une grande
autonomie dans leurs gestes de la vie quotidienne.

Juste avant le déjeuner, le directeur régional de Khulna nous offre une entrevue pour mieux nous faire connaitre
les programmes de la Caritas locale. Il nous réexplique les nombreuses actions menées dans le secteur. Il nous
remercie pour les actions menées par le Secours Catholique en France, et pour l’engagement des bénévoles.
Au Bangladesh, certaines personnes s’engagent également comme bénévoles. Toutefois, il ne s’agit que

d’interventions ponctuelles exclusivement centrées sur des catastrophes naturelles. Caritas Bangladesh a comme
projet de créer un réseau de bénévoles qui puisse les aider dans leurs actions quotidiennes.

Apres cette matinée déjà bien remplie, nous prenons la route pour Jaynagor où nous attend l’équipe locale. Elle
est spécialisée dans le programme ICDP pour la communauté Rishi. Nous avions déjà rencontre des personnes
de cette communauté quelques jours plus tôt, mais cette fois nous avons beaucoup plus d’informations. D’après
un système de caste de la société hindoue, la communauté Rishi est la plus pauvre de toutes les castes. Elle subit
des discriminations à plusieurs niveaux :
- social (ils sont exclus des évènements publics)
- scolaire (les enfants n’ont pas le droit de s’asseoir aux premiers rangs de la classe)
- géographique (ils subissent des occupations illégales de leurs terres)
- ...
Toutes ces situations les ont amenés à ne plus pouvoir subvenir à leurs besoins basiques d’où la nécessite
d’interventions extérieures, notamment par des associations telles que Caritas.

Forts de cette connaissance de la population, nous rendons visite aux villageois Rishi. L’accueil est convivial et
attentionné. Contrairement à ce que pourrait laisser penser leur condition sociale, nous découvrons des personnes
très organisées. Le village compte trois coopératives de commerce et d’artisanat. Soulignons que deux d’entre
elles sont composées majoritairement par des femmes. Le développement de projets intéressants tels que la mise
en place d’un jardin de plantes médicinales, d’une épicerie, l’élevage de pigeons, le travail du bambou et le
système d’épargne géré par Caritas nous surprend. C’est la première fois que nous observons un tel engouement
de la population à contribuer à son propre développement.

24/07/11

Pour notre dernière journée de rencontre de population, nous sommes accueillis dans deux autres villages de
communauté majoritairement Rishi. Ils bénéficient par Caritas du même soutient que le village vu la veille, et
se développent eux aussi très rapidement et avec un grand désir de s’en sortir. Les activités sont identiques :
commerce, textile, bambou et aussi système de microcrédit. Par contre, ces deux villages ont développé des
activités culturelles et de loisirs à la fois pour les enfants mais aussi pour les adultes. En particulier, ils sont
fiers de nous présenter leurs performances théâtrales qui nous soufflent littéralement. A partir de la passion
de quelques villageois pour le jeu théâtral, cette pratique s’est développée dans les deux villages qui sont très
proches. Les scènes de théâtre sont également utilisées comme un moyen de faire passer des messages pour les
personnes illettrées. Par exemple, la troupe nous joue une pièce contre le mariage des enfants, pratique autrefois
courante mais qui diminue de plus en plus grâce à la sensibilisation de diverses associations comme Caritas.

Dans le village de Sagda, certains villageois qui s’organisent pour promouvoir leurs droits ou la santé nous
attendent pour nous présenter leurs actions. En particulier, un homme nous présente son combat contre le
gouvernement pour se réapproprier ses terres. La semaine précédente, d’autres Bangladeshis de la région de
Dinajpur avaient évoqué des problèmes de terres hypothéquées qui sont volées par de grands propriétaires pour
les cultiver. Mais là, le problème est encore différent : le gouvernement confisque les terres aux paysans qui ne
peuvent pas payer les impôts. Or ceux-ci sont extrêmement chers au vu des revenus des paysans. C’est pourquoi
les villageois se mobilisent et sont soutenus par des organisations non-gouvernementales, entre-autres, Caritas.

Une femme nous expose ensuite son parcours de sage-femme. Elle travaille dans les dix villages aux alentours,
ainsi que pour l’hôpital de la ville la plus proche. Elle offre ses services et de son temps sans compter, le
tout pour un revenu de 1 500 takas par mois, soit environ 15 €uros. Mais au-delà de son action de conseil et
d’assistance autour de la maternité, elle lutte avec énergie pour la cause féminine. Elle dialogue énormément
avec toutes les femmes qu’elle peut rencontrer pour les inciter à travailler pour gagner leur indépendance.

Ces deux dernières personnes que nous rencontrons nous permettent de clôturer notre tour des villages avec
beaucoup d’enthousiasme. Nous sommes rassurés de voir que les actions menées par Caritas sont utiles pour
les enfants mais aussi pour leurs parents et même, par extension, pour les villages et communautés dans leur
ensemble. Mais au-delà des actions de l’association, les initiatives prises par de nombreuses communautés nous
montrent à quel point les Bangladeshis ont pris leur destin entre leurs mains et qu’ils souhaitent faire avancer
leur situation et leur pays.